« Il semble évident que le mystère dans lequel ont été introduits et Poullart des Places et Libermann est celui du Christ pauvre ; l’oeuvre à laquelle ils ont été destinés est l’évangélisation des pauvres : « Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres ». (Amadeu Martins en introduction à un article intitulé « Poullart des Places, Libermann et le mystère du Christ pauvre »)
Levavasseur, Tisserant, Libermann et ceux qui vont les rejoindre dans la Société des Missionnaires du Saint Cœur de Marie se sont sentis appelés à venir en aide aux Noirs des îles de l’Océan Indien ou des Caraïbes, car ils sont persuadés qu’ils sont les plus pauvres et les plus délaissés de leur temps. Ils ont en même temps une autre conviction, qui fait partie de notre charisme, que ces pauvres ne valent pas moins que les autres, que « les Noirs ne sont pas moins intelligents que les autres peuples » et qu’ils ont la même dignité et les mêmes droits qu’eux. Comme chrétiens ils croient aussi que la plus grande pauvreté est de ne pas connaître Jésus-Christ. Mais ils sont convaincus que « le temps du salut » est arrivé pour ces peuples et qu’ils sont appelé « à prendre leur part aux grâces de Jésus-Christ et leur rang dans la sainte Église ».
La Règle de Vie spiritaine ne cesse de nous rappeler que ce lien profond aux pauvres qui vient de notre appel marque toute notre existence : notre style de vie, les maisons que nous habitons, les moyens dont nous nous servons pour la mission, notre liturgie et notre prière… En tout il ne faut jamais oublier notre solidarité avec les pauvres auprès desquels nous sommes envoyés.
Alors Pierre lui dit : « Je n’ai ni argent, ni or; mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus Christ de Nazareth, lève-toi et marche ». Et le prenant par la main droite, il le fit lever. Au même instant, ses pieds et ses chevilles devinrent fermes ; d’un saut il fut debout, et il se mit à marcher. Il entra avec eux dans le temple, marchant, sautant, et louant Dieu. Tout le monde le vit marchant et louant Dieu. Ils reconnaissaient que c’était celui qui était assis à la Belle porte du temple pour demander l’aumône, et ils furent remplis d’étonnement et de surprise au sujet de ce qui lui était arrivé.
Pierre et Jean montaient ensemble au temple, à l’heure de la prière : c’était la neuvième heure.
Il y avait un homme boiteux de naissance, qu’on portait et qu’on plaçait tous les jours à la porte du temple appelée la Belle, pour qu’il demandât l’aumône à ceux qui entraient dans le temple. Cet homme, voyant Pierre et Jean qui allaient y entrer, leur demanda l’aumône. Pierre, de même que Jean, fixa les yeux sur lui, et dit : Regarde-nous. Et il les regardait attentivement, s’attendant à recevoir d’eux quelque chose.
« Je n’ai pas d’or et d’argent ; mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, lève-toi et marche ». Devant la demande de cet « infirme de naissance », Pierre et Jean se sentent démunis. Mais ils ont appris auprès de Jésus à voir, au-delà des apparences, toute la détresse de cet homme et son désir de vivre. Face à lui, Pierre reconnaît que leur seule richesse est le Christ Vivant et sa Bonne Nouvelle qui fait vivre ; l’Esprit reçu à la Pentecôte, Esprit d’amour et puissance de transformation, capable de rendre toute chose nouvelle. Alors il ose appeler cet homme à croire en la vie et à se lever.
Quelques règles de conduite à tenir envers ceux que nous devons évangéliser
Dans la Règle Provisoire rédigée à Rome, Libermann veut « donner une impulsion et établir un véritable esprit de l’oeuvre ».
« 3 – Ils auront un soin et une tendresse sainte et toute particulière pour les plus pauvres et les plus malheureux selon le monde. Ils les traiteront avec une bonté et une prédilection très grande. Ils leur procureront tous les secours et les soulagements qu’ils pourront sans trop examiner s’ils le méritent ou non. Ils s’entretiendront souvent avec eux, les visiteront fréquemment dans leurs pauvres réduits…
5 – En général ils auront une tendresse et une compassion très grande envers les affligés, ils apporteront à leurs peines tous les soulagements et toutes les consolations qu’ils pourront.
6 – Ils seront les avocats, les soutiens et les défenseurs des faibles et des petits contre ceux qui les oppriment…
8 – Plus ces pauvres gens seront abjects et méprisés parmi les hommes, plus notre cœur sera ému de tendresse et de compassion pour eux. Plus ils sont maltraités par les autres, plus nous les traiterons avec bonté et avec attention.
14 – On fera tout ce qu’on pourra pour établir entre les riches et les pauvres, les blancs et les noirs, cette charité chrétienne qui fait que tous les hommes se considèrent comme frères en Jésus-Christ, afin d’éteindre par là les mépris et l’indifférence d’une part, les jalousies et les haines de l’autre » (Règle Provisoire, 1845, N.D. p.255-258).
Tous ces passages soulignent que le service se vit dans une relation, une rencontre où tout notre être est engagé, y compris notre cœur et notre capacité de compassion. Mais l’amour dont il est question est « fort », capable aussi de « défendre », de s’opposer à celui qui opprime. Ce passage parle aussi de justice et de paix. La justice est la condition de toute relation libre et vraie.
Seigneur, toi qui nous a appelés à annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres, aide-nous à sortir de l’indifférence, devant les détresses des hommes. Rends-nous libres et désintéressés pour un service authentique et compatissants envers ceux qui souffrent. Que ton Esprit de communion nous aide à former des communautés accueillantes, où ceux qui n’ont rien à donner découvrent leurs richesses, où « personne n’est trop pauvre pour n’avoir rien à dire », où l’étranger se sent à l’aise, et où notre relation aux biens permet le partage et la justice. Toi qui vis et règnes pour les siècles des siècles. Amen |