Nico, pourquoi avoir choisi de vivre ce temps de volontariat chez les spiritains, au foyer Caris de Chevilly-Larue ?
Après mon bac, je ne me suis pas senti appelé à continuer mes études tout de suite. Je désirais offrir une année pour grandir, travailler ma personnalité auprès de personnes qui ont besoin de parler et surtout d’être écoutées.
Dans ma paroisse en Allemagne, il y avait deux jeunes qui étaient déjà partis avec le programme MaZ*. Ce n’est pas seulement une opportunité offerte par les spiritains, mais un ensemble de congrégations religieuses missionnaires qui proposent ce type de séjour à de jeunes garçons et filles.
Ma copine Darja et moi sommes donc partis à Madagascar en Août 2013 avec les spiritains. Je vivais dans un foyer pour enfants de la rue et ma copine dans une école dirigée par des sœurs. Malheureusement, au bout de quelques mois notre ambassade nous a demandé de quitter le pays rapidement pour des raisons de sécurité, du fait des élections. Darja est donc partie au Sénégal et moi, j’ai demandé à continuer de vivre cette expérience interculturelle au Foyer Caris, où j’avais déjà passé 2 semaines en stage communautaire avant mon départ à Madagascar.
Quel est ton quotidien au foyer et dans la communauté spiritaine ?
Je participe à la vie religieuse de la communauté spiritaine : prière du matin (laudes), messe, prière du soir (vêpres). Les matins, j’aide dans le service de tri de livres à envoyer pour des séminaires et maisons de formation en Afrique et dans le monde. L’après-midi, je visite les anciens de la communauté qui sont à l’infirmerie. Je participe aux repas de la communauté le matin et le midi. Le soir, je mange avec les personnes du foyer Caris. Mercredi soir et samedi matin, je rencontre des personnes qui vivent dans la rue, en participant aux activités de la Conférence St Vincent de Paul de la paroisse St Etienne du Mont à Paris. La fidélité dans la présence, qui est ici essentielle, conduit à créer des relations très riches et des échanges simples, mais souvent vrais avec des personnes vivant l’expérience de l’exclusion.
Une grande joie et un moment difficile vécu à Caris :
J’ai été très touché par notre repas de Noël au foyer, que nous avons vécu ensemble le soir du 24 décembre, après la messe à la communauté spiritaine. Il était préparé par les personnes du foyer et chacun avait participé et trouvé une place. Des amis et quelques spiritains étaient venus nous rejoindre pour fêter Noël avec nous. C’est la première fois que je fêtais Noël en dehors de ma famille et, heureusement, j’ai trouvé comme une deuxième famille au foyer Caris !
Nous avons dû accompagner certains de nos résidents lors de décès dans leur famille. Même si parfois les relations familiales étaient souvent difficiles, le décès conduit à faire réfléchir les personnes. Être simplement là avec eux leur est d’un grand secours.
Comment vois-tu le fonctionnement de Caris, la relation avec la communauté, avec l’extérieur ?
Pour moi, le foyer Caris n’est pas un lieu de soins, mais simplement il propose un espace de repos pour que les personnes puissent s’aider par elles-mêmes.
De plus en plus de spiritains et d’amis viennent nous rencontrer. Pour les personnes du foyer, c’est très important qu’il y ait des personnes extérieures qui s’intéressent à notre vie et qui viennent un peu partager notre quotidien. La communauté, régulièrement informée de ce nous vivons, porte le foyer dans sa prière, ce qui est très important pour nous !
Que retires-tu de cette expérience, et comment envisages-tu l’avenir ?
L’année prochaine, je commence une formation en lien avec la compagnie de chemin de fer allemande. Depuis que je suis petit enfant, je suis en effet passionné par les trains et je pense pouvoir trouver beaucoup de plaisir à travailler comme cheminot. Le temps que j’aurai passé ici m’aide aussi pour améliorer mon français car j’aimerais bien travailler dans les transports ferroviaires franco-allemands !
Le service auprès des personnes cassées par la vie ici a changé mon regard sur le monde et m’a conduit à grandir en maturité. Je suis touché par la force de vie qui émane de ces personnes et qui les a conduit à commencer un autre chemin de vie. Le simple fait de dire bonjour et de prouver ainsi que ces personnes ne sont pas invisibles est un grand cadeau pour les personnes ayant vécu l’exclusion. Je garderai un bon souvenir de mes rencontres ici et j’aimerais continuer à garder le contact avec les personnes rencontrées qui sont devenues pour moi des amis.
Que dirais-tu à un étudiant ou jeune pro qui souhaiterait tenter l’expérience d’un volontariat à Caris ?
Ne vous restez pas bloqué sur une première impression à la vue de personnes, vivant l’exclusion dans la rue. Avec d’autres, continuez à créer et entretenir des ponts pour que l’exclusion soit moins difficile à vivre. La rencontre avec les personnes vivant à la rue va changer votre vie ! De grands trésors de sagesse et d’expérience se cachent derrière ces personnes souvent bien trop discrètes …
* « Missionnaire pour un temps » : association allemande qui propose un volontariat à l’étranger, d’une durée en général d’un an, en lien avec une communauté religieuse missionnaire (spiritaine ou autre). Pour plus d’informations, voir www.maz-spiritaner.de