Mathieu, qui es-tu ?
Ingénieur agro de formation et frère spiritain depuis peu, j’ai prononcé mes premiers vœux dans la Congrégation en septembre 2014 à l’âge de 35 ans. Ce premier engagement faisait suite à deux ans de postulat à Lille et un an de noviciat à Chevilly, qui m’ont permis de mieux connaître la Congrégation, la vie religieuse, et d’approfondir ma foi.
Comment as-tu connu les spiritains ? Quelles ont été tes premières impressions ?
J’ai connu les spiritains pour la première fois aux Philippines où j’étais parti comme volontaire DCC en 2007-2008. J’avais à cette époque ressenti le besoin de changer d’air, de me rendre utile, et de réfléchir à mon parcours après plusieurs années de vie professionnelle dans l’industrie agroalimentaire, qui avaient été enrichissantes à différents niveaux mais avec un goût d’inachevé. Là-bas, j’ai travaillé avec les spiritains sur un projet de développement rural et participé à leur vie quotidienne. Malgré les difficultés de toutes sortes qui ne manquèrent pas de se présenter, j’ai découvert une communauté extrêmement accueillante et ouverte au service des plus pauvres, et j’ai surtout compris avec eux l’importance d’une vie unifiée autour d’une vision commune d’un monde plus humain et fraternel, et non plus écartelée entre un certain développement personnel, un travail apportant la sécurité financière, et une vie sociale sans but précis…
Comment as-tu franchi le pas de l’engagement ?
De retour au pays et à nouveau plongé dans le monde professionnel, j’ai poursuivi ma découverte de la Congrégation à travers la Province de France et aussi via quelques voyages qui m’ont donné à voir la diversité des apostolats spiritains dans le monde, avec leurs richesses et leurs faiblesses, qui font aussi écho aux miennes. Après un parcours de discernement accompagné par des jésuites et la découverte progressive d’un appel personnel à la vie religieuse, j’ai choisi de rejoindre la Congrégation du Saint-Esprit pour son esprit de simplicité fraternelle, l’authenticité de ses membres, son accueil inconditionnel de l’autre et surtout ce côté « sans prétention » des humbles travailleurs du Royaume qui me semble être une caractéristique importante du charisme de la Congrégation.
D’après toi, quelle est la mission des spiritains en France et à l’étranger aujourd’hui ?
Pour moi, les spiritains sont (et doivent rester) avant tout des religieux, qui vivent en communautés internationales et partagent ensemble le pain quotidien et les soucis du monde, en se portant mutuellement (ainsi que tous ceux qu’ils rencontrent) dans la prière. Certains vivent la vie religieuse dans le sacerdoce, d’autres non (c’est mon cas : je ne me suis jamais senti appelé à être prêtre), mais tous vivent la même mission de « proclamation de la bonne nouvelle » en luttant contre les injustices, en travaillant à un monde plus solidaire, plus fraternel, plus humain, malgré les faiblesses de chacun. Pour moi un aspect très important du charisme spiritain est cette mission de « bâtisseur de ponts » entre les cultures, entre les religions, entre des groupes qui auraient tendance à s’opposer, et par suite la construction ensemble du Royaume, dans le même Esprit d’Amour et de Don qui est celui de Jésus.
Comment comptes-tu prendre part à cette mission ?
Cette mission ne peut se faire qu’en premier lieu par le témoignage de nos propres communautés. C’est une conviction profonde et malheureusement la réalité est parfois différente. Comme toutes les congrégations, celle de Poullart des Places et Libermann connaît ses dérives cléricales, ses tentations individualistes, ses pertes de vitesse. Cela ne remet pas en cause notre mission. A toi qui te poses la question de la vie religieuse ou qui aimerais rejoindre la famille spiritaine au sens large, je voudrais dire que tout engagement est un défi à relever et aucun n’est facile. Mais quand on fait confiance et qu’on est certain du but, le reste suit.